Un nourrisson enveloppé dans une grande couverture de laine, laissé un soir d’automne sur le perron de l’orphelinat Bel-Hélène, réveilla l’établissement par ses pleurs de mécontentement et de détresse, entre froid et faim. C’est l’infirmière qui ouvrit la porte et l'amena à l'intérieur. L’hospice accueillait les orphelins de la petite enfance à l'adolescence ; la personne ayant abandonné son enfant n’avait pas choisi le lieu au hasard. Le bébé était enveloppé dans une couverture où était inscrit le nom "Elena".
La petite fut élevée en cet endroit. Les filles ne l’aimaient pas parce qu’elle était trop bizarre, trop jolie, avec ses cheveux ébènes, sa peau pâle et ses yeux de miel, et trop calme, comme si elle se prenait déjà pour une "grande". On n’appréciait pas qu’elle eut l’air de n’avoir besoin de personne, qu’elle fasse rougir les garçons d’un sourire et que ce fut à elle qu’ils voulaient faire des cadeaux les jours de fête.
La vérité, c’est qu’Elena se sentait spéciale et, d’une certaine façon, elle l’était. Les autres filles se moquaient qu’elle n’avait pas d’amie. Aspirant au calme, Elena réclamait parfois le silence et on l’écoutait. Cette influence sur les autres constituait les prémices de sa magie future. Or cette influence touchait tout. Les plantes, les humains, et surtout les animaux Très jeune, en été, elle lisait parfois en étant adossée contre un chêne dont les feuilles filtraient les rayons agressifs du soleil. Un jour, elle posa son livre, leva la main vers la colombe suspendue à une branche, et attendit. Les autres enfants curieux s’approchèrent lorsqu’ils virent un oiseau blanc sur la main d’Elena. «
Vous voyez » leur dit-elle «
J’ai un ami. » On la traita de monstre.
La nuit de l’hiver qui suivit, à ses douze ans, l’orphelinat fut en flammes et les enfants entassés dans des charrettes qui les conduisirent au bord de mer. Leurs ravisseurs, armés et encapuchonnés, leur avaient intimé le silence. Ils furent transportés par bateau sur l’île Seraphi, où la construction d’un système-R avait commencé. Il y en avait d’autres à cette époque, dont le fameux situé à Ka-elm qui survivrait aux autres. Elena ferait toujours preuve d'un calme exemplaire par la suite mais, cette épreuve de la vie fut en réalité aussi traumatisante pour elle que pour les autres.
Réduits à l’état d’esclaves avec d'autres captifs de tout âge, les enfants furent maltraités, terrorisés, contraints de travailler d’arrache-pied… seule Elena semblait disposer d’un étrange traitement de faveur. Son repas était un peu plus consistant que les patés de chien des autres, elle travaillait un peu moins et, on avait tendance à céder à ses modestes demandes. Les prisonniers étaient bien trop moins-que-rien pour être appelé par leur prénom mais, on surnommait Elena "Les cheveux d'onyx". Au départ, cela attisa la haine des autres. Ils voulurent se venger du mal qu'ils recevaient sur celle qui n’en recevait pas assez. Les cheveux d’onyx calma les rancunes grâce à son pouvoir, mais elle n'échappait pas aux insultes, ni au rejet. Parfois, elle recevait des coups isolés. La jeune fille se rendait compte que sa survie se jouait à peu de choses. Si un jour, un esclave perdait tout discernement et décidait de s’en prendre à elle, elle ne pourrait pas se défendre… Alors, elle décida de partager un peu ses privilèges avec deux personnes, qui ne furent pas choisies au hasard, puisqu’ils étaient de haute stature, vigoureux. Ils ne restèrent pas aux côtés de l’Onyx seulement parce qu’elle rendait leur vie moins misérable mais, parce qu’elle leur promettait qu’elle les sortirait de là.
Ce qui calma, un moment, la haine de certains prisonniers, ne fut pas tant les nouveaux gardes du corps de l’Onyx, mais bien le fait que personne n’était venu les secourir; personne ne semblait se soucier d’eux. Comme il fallait se raccrocher à un espoir, on eut l’impression qu’elle était peut-être (un peu) la solution à leur malheur. «
Tu peux leur demander d’être gentils avec nous ? Ils t’écoutent. » L’épine dorsale de la fille de redressa. Le doux miel devint froid et impérieux… «
Je ne vous ai pas encore pardonné. » sentença t-elle avec importance. Il y eut une scission entre ceux qui voulurent se faire "pardonner" auprès d’elle, et ceux qui la haïrent encore plus. «
Faites-moi confiance, notre heure est proche » disait-elle à ses amis.
Un des suiveurs de l'Onyx était frêle, et il tombait souvent malade à cause du manque d’hygiène et de la malnutrition. Il partageait la cellule de la jeune fille. Une nuit de fièvre, elle posa la main sur son front pour l’apaiser. «
Est-ce que je vais mourir ? » lui demanda t-il. «
Non, tu ne vas pas mourir » «
Si je me lève demain, je ne réussirai jamais à tenir la journée... » La jeune fille le regarda dans les yeux. «
Tu réussiras. Tu es plus fort que tous les autres » Sa prophétie s’accomplit. L’enfant n’avait pas guéri mais il avait surpassé son mal et avait montré une vigueur et une bravoure exemplaire. «
C’est grâce à toi 'Nyx. Montre tes miracles aux autres, ils croiront en toi aussi. » «
Je n’offrirai pas de miracles aux hommes pour les inciter à croire en moi, je leur offrirai des miracles pour les récompenser d’avoir cru. » Dans l’ombre, la jeune fille faisait grandir son pouvoir et le testait souvent, jusqu’au jour où elle fut prête. L'onyx avait retenu la fréquence à laquelle les bateaux acheminaient les matériaux nécessaires à la construction du système R, et à quel moment elle pourrait donc en disposer d'un...
Elle mit son plan à exécution durant la nuit, quand elle prit le contrôle de l’esprit du garde qui fermait la cellule derrière eux. L'Onyx lui ordonna de laisser la porte ouverte et de l’accompagner. Dans les allées, la jeune fille ordonna l’ouverture de quelques cellules, celles qui retenaient les personnes qui avaient cru en elle. Quand ils avaient un voisin qu'elle n'aimait pas, qui l'avait reniée, Nyx ordonnait à cette personne de rester à l'intérieur et le geôlier refermait la porte. Ils croisèrent d’autres de leurs bourreaux qui montaient la garde mais la jeune fille prit également le contrôle de leur esprit pour les laisser passifs, à la merci de ses alliés. Le petit groupe, accompagné du même garde, montèrent dans un bateau avec celui-ci. Ils avaient encore besoin de leur otage car aucun d’eux ne savait conduire un bateau.
Ils accostèrent sur la région de Seven et tuèrent leur prisonnier. Arrivés au premier village qui croisa leur route, ils intégrèrent une guilde pour ne pas avoir à retourner à dans un orphelinat. Nyx réalisa que son pouvoir d'influence ne touchait plus la nature, ni les animaux. Tout cela ne lui répondait plus depuis qu'elle avait mis à mort. Leur village de résidence avait quelque légendes très connues, ainsi que des figures incontournables telle que la diseuse de bonne aventure vivant sur la place de l’église. Nyx mit de l’argent de côté de ses petites missions pour pouvoir obtenir une séance avec elle, curieuse de savoir si ses rêves de grandeur se concrétiseraient. La voyante ne lui annonça guère de bonnes nouvelles… elle lui eut l’air tout à fait hostile d’ailleurs, et lui annonça simplement qu’elle ne mènerait jamais ses projets à bien car elle mourrait à l’âge de trente ans, tuée par un guerrier puissant, héros parmi les héros.
Cette prémonition bouleverserait Nyx à jamais. Tourmentée, elle rentra à la guilde. Le lendemain, elle fut chassée de l'endroit par son maître qui la traita de monstre, ce qui n’était que le début du calvaire car, une fois dehors, le village entier se trouvait aux portes de la guilde, lui criant de dégager et de ne jamais revenir. On lui jeta divers objets et, prise de panique, elle courut hors du village. Ses amis, ceux qui l’avaient suivi depuis le début et s'étaient réveillés avec elle, se précipitèrent à sa suite. Ils avaient laissé toutes leurs affaires à la guilde. «
Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? »
Malgré son jeune âge, Nyx ne pouvait pas, en tant que leader, répondre « je ne sais pas » à cette question. Elle prit la direction des montagnes, notamment le mont Lysra afin de trouver Maître Xin Lei. C’était le seul nom qu’ils connaissaient, souvent prononcé dans leur ancienne résidence ; la seule branche à laquelle ils pouvaient se raccrocher. Ils eurent la chance d’être accompagné par la douceur du printemps dans leur ascension. Maître Xin Lei fut facilement trouvé, il était connu partout où ils allaient et il tenait une école formant des samouraïs. Xin Lei était prêt à accepter ces adolescents à condition qu’ils remplissent, comme tous les autres, des missions au nom de l’école ; qui recevait des demandes tout comme les guildes. Les adolescents furent dûment formés à l’art de l’épée et à des techniques de mages. Nyx apparut comme une élève brillante. Elle était toujours la première arrivée aux classe et la dernière à partir, elle s’entrainait durant les heures de pause, animée par la crainte d'une mort prématurée.
On ne se méfiait pas de cette eau qui dormait. Après quatre ans de formation. Nyx atteignit sa majorité. Avec ses camarades, son enseignement lui permit d’allier force, dextérité, agilité. Elle resta deux ans de plus à l'école, en tant que professeure. A l’issue de ces deux années, avec Xin Lei et ses suiveurs, Nyx se lança à la poursuite d’Anubis, un démon des livres de Zeleph qui sévissait à Isenberg. Durant le combat, Nyx se servit de Xin Lei comme bouclier par ses commandements ; ce dernier périt, mais Anubis fut vaincu. Nyx sortit différente cet affrontement. Des stigmates apparurent sous son sein gauche.
Suite à cette victoire, Nyx s'adressa aux rescapés du village qu'avait attaqué Anubis. Elle leur proposa de la suivre et de l’aider à vaincre les autres démons de Zeleph, dans sa guilde de Soul Reaper, qu'elle créa à l'instant où elle en parla. Avant toute chose, elle ordonna à un de ses plus fidèles hommes, un seul, de la venger en allant détruire le village qui les avait chassés des années plus tôt. Il s’en chargea de bon coeur. Elle ne justifia pas sa barbarie auprès de ses nouveaux partisans ; ceux-ci ne furent pas mis au courant. Cependant, on trouva cela étrange que Nyx se réveille avec des cheveux d'argent. L'onyx s'était complètement dissipé, probablement en même temps que ses états d'âmes. Son ambition changea subtilement, ou plutôt, elle en intégra une autre, celui d'asservir les peuples. Si elle gagnait en puissance, si elle détenait une garde rapprochée puissante, aucun mage ne pourrait la tuer. Elle asservit quelques villages par la ruse, en les sauvant de fléaux qu'elle avait elle-même abattu sur eux, secrètement. Et elle en asservit d'autres, moins influents, par la force. En quelques temps, elle contrôlait tous le sud de Seven. Elle voulut descendre vers Fiore mais... tout ne se déroula pas comme prévu.
C'est une autre terre qui l'accueillit. Edoras. Alors qu'ils prirent lentement leur marque sur le continent de Solest, des soldats les trouvèrent pour leur faire savoir, aimablement, que le roi Mystogan proposait des aides de logement aux earthlandais. «
Cet homme n'est pas mon roi » Les Reapers tuèrent les soldats, avant de créer leur propres petits nids sur les monts Novara, où ils disposaient d'une vue splendide qui plaisait à leur reine. Ces premiers temps à Edoras furent de l'information et du repérage. Ce Weisslogia faisait bien trop parler de lui et la puissance à laquelle on l'estimait inquiétait Nyx. Heureusement, ses informateurs lui offrirent un jour des nouvelles intéressantes... Skyadrum lui avait tourné le dos, avec une partie des hommes de Lux Requiem. Cela divisait leur force ! Nyx profita de l'aubaine pour pouvoir écraser, avec Skyadrum, leur plus grande menace, celui qui pouvait l'empêcher de prendre la place de Mystogan sur le trône.
Il y eut une terrible bataille mais, Nyx n'attendit pas que sa garde soit décimée avant d'agir. Au moment où Weisslogia allait s'en prendre à son fidèle Malik, Nyx sonna l'abdication de ce dernier... en le mettant à terre par la commande de souffrance. Elle s'avança ensuite, comme si elle allait entamer elle-même le combat et Weisslogia sembla se prêter à l'idée de tuer le maître des Reapers immédiatement. Il l'attaqua, Nyx leva la main... «
Paix » ordonna t-elle, son regard d'or soutenant celui de l'ennemi, tandis que son index touchait l'avant-bras de celui-ci et que la lame de Lux Tenebris s'arrêtait net proche de sa chevelure d'argent. Ces commandements ne pouvaient jamais durer avec des hommes comme Weisslogia alors, elle ne passa pas par quatre chemin. «
Tu es peut-être puissant, mais as-tu fait les comptes ? Mes soldats ne te suivront jamais. Sans nous, vous serez écrasés par le gouvernement de Mystogan. Je te propose une alliance entre nos guildes. Puisque tu es vainqueur, entre tes mains résident notre sort à tous... y compris le tien. » Ainsi fut formée la nouvelle Alliance Baram. Nyx avait appris de cette expérience qu'elle n'était toujours pas assez puissante. Elle amassa d'autres fidèles pour préparer son ascension future...
Tout aurait dû se jouer à l'attaque de la Cité Royale. Dès la mort du roi, leur victoire incontestable, et l'affaiblissement suffisant du camp ennemi, la Reaper aurait trahi l'alliance. Tout ne se passa pas comme prévu. L'armée s'était solidifiée, les guildes de mages légales aussi.
Nyx se retrouve donc enchainée aux deux autres maîtres pour une durée bien plus longue que prévu. Le temps commence à lui manquer. Ses trente ans approchent. Il faut qu'elle soit couronnée reine avant... Tant qu'elle n'a pas complètement écrasé l'ennemi, elle est vulnérable.