Dans les profondeurs de Crystal Valley, là où même les rumeurs se perdaient dans les échos des systèmes de sécurité ultra-sophistiqués, James Canterbury observait son royaume technologique avec une satisfaction dissimulée derrière son regard acéré. Son laboratoire souterrain, interdit d’accès à tout individu non trié sur le volet, était la matrice de sa véritable puissance. Là, loin du regard des foules, de ses concurrents, et même de ses alliés, il façonnait l'avenir d'Edoras, et le sien.

Les couloirs métalliques, baignés d’une lumière bleutée émise par les immenses lacrymas enchâssées dans les murs, donnaient au lieu une atmosphère irréelle. Tout ici était une fusion parfaite entre la technologie de pointe et la magie la plus avancée. Chaque souffle d’air portait l’odeur de l’électricité statique, chargée de magie pure. Les murs étaient ornés de runes de protection, des cercles complexes de symboles qui protégeaient le lieu contre toute intrusion, même des mages les plus puissants. Seuls les plus brillants, ceux qu’il avait personnellement choisis pour leur dévotion et leur talent, avaient le droit de franchir ces portes.

Mais malgré l'ampleur de ce projet titanesque, une ombre pesait sur les équipes d'ingénieurs et de scientifiques. L'épuisement progressif de la magie des sols d'Edoras était devenu une réalité impossible à ignorer. Les ressources d'aethernanos, jadis infinies, s'amenuisaient chaque jour, menaçant non seulement leurs travaux, mais l'équilibre magique de tout le royaume. Les inquiétudes se murmuraient dans les couloirs, à voix basse, entre deux calculs ou deux ajustements de cristaux magiques.

Ce jour-là, une tension palpable régnait dans une salle de réunion improvisée, où plusieurs des ingénieurs les plus brillants de James s'affairaient autour d’un tableau noir, couvert de formules complexes. La conversation était agitée.

— Le flux magique est bien trop instable à ces niveaux ! s’exclama un ingénieur, exaspéré. Même si nous réussissons à extraire les particules d'aethernanos, la perte d’énergie est colossale. Nous gaspillons plus que nous n'en stockons !

Un autre, visiblement fatigué, répondit d’une voix lasse :

— Les lacrymas ne peuvent pas supporter une telle pression sans surcharge. Nous aurions besoin d'une nouvelle technologie pour les stabiliser... Mais même avec ça, nous approchons des limites de ce qui est possible.

Un troisième fronça les sourcils devant le schéma :

— Nous devons trouver un moyen d’amplifier sans saturer. La magie d’Edoras disparaît, et nous la gaspillons à une vitesse affolante.

C’est à ce moment précis que la porte principale du laboratoire s'ouvrit, laissant entrer James Canterbury lui-même. La lumière bleutée dansait sur son visage tandis qu'il descendait les marches, chaque pas résonnant sur le sol métallique. Son cigare coincé entre ses lèvres, James avançait avec cette aura impérieuse qui ne laissait place à aucun doute : l’homme qui venait d'entrer détenait toutes les cartes. Sans un mot, il prit place devant le tableau, écartant les ingénieurs d’un simple regard narquois.

« Allons, allons, messieurs… On s’affole ? » lâcha-t-il d’une voix grave, empreinte de son charisme habituel. Un sourire arrogant se dessina au coin de ses lèvres alors qu'il observait le fouillis des équations. « Vous êtes ici pour briser les lois de la magie, pas les subir. Ce que je vois là, c’est de la panique, et chez moi, on ne panique pas. »

James arracha le cigare de sa bouche et l’écrasa dans un cendrier d’un geste vif avant de saisir un marqueur. Il se dirigea vers le tableau avec l’assurance d’un homme qui n’avait jamais été confronté à une situation qu'il ne pouvait pas contrôler. Ses mouvements étaient précis, presque chorégraphiés. Rapidement, il barra les équations incompréhensibles, les remplaçant par des lignes plus fluides, plus élégantes.

— Votre erreur est de traiter ces résonateurs comme des systèmes fermés. Vous gaspillez la magie brute en tentant de la stocker, alors qu’elle devrait être modulée. Il traça des cercles imbriqués, reliant différentes sections du tableau. Ce qu’il nous faut, c’est un circuit résonant qui recycle l'énergie magique. Nous devons compresser les flux d'aethernanos et les recycler dans une boucle fermée pour éviter les pertes. Une fois stabilisée, la magie pourra alimenter nos lacrymas sans surcharge. Vous divisez la charge sur plusieurs lacrymas, et ensuite vous la faites passer par une matrice de diffraction. Cela vous permet de stabiliser la décharge sans surcharger les noyaux. Les distorsions magnétiques ne sont qu’une question d’amplitude, pas de fréquence.

Les ingénieurs se rapprochèrent, fascinés par la démonstration. James poursuivit, détaillant chaque aspect de sa solution, expliquant comment chaque lacryma pourrait être utilisée non pas comme un simple réservoir, mais comme un catalyseur dans une série de cycles fermés. Il parla des résonateurs comme des oscillateurs harmonieux, capables de synchroniser les différentes fréquences magiques pour prolonger leur durée de vie tout en amplifiant leur puissance.

— Nous n’avons plus le luxe de gaspiller la magie d’Edoras. Bientôt, elle se tarira complètement, et ceux qui en dépendront seront à genoux. Crystal Valley, en revanche, sera un bastion de puissance inégalée. Grâce à ce projet, nous prolongerons nos standards de sécurité pour des décennies, voire plus.

Un ingénieur, osant à peine croiser le regard de James, prit la parole timidement :

— Mais, monsieur... Ce projet nécessiterait une série de lacrymas de nouvelle génération… Des technologies que nous n'avons pas encore finalisées...

Un sourire arrogant s’étira sur le visage du président.

— Vous me prenez pour qui ? Son rire sec résonna dans la salle. Vous avez dix jours pour implémenter ces solutions. D’ici là, vous aurez tout ce qu’il vous faut. Moi, je fais dans l’efficacité, pas dans l’excuse. Vous croyez que je ne peux pas obtenir ce dont vous avez besoin ? Je contrôle cette ville et tout ce qui en sort, et il en ira de même pour ce monde quand nous en aurons fini.

Un ingénieur, osant un geste rare, demanda timidement :

— Et si nous échouons, monsieur ?

James éclata de rire, un son rauque et rempli de sarcasme.

— Si vous échouez ? Alors vous pourrez toujours chercher du travail ailleurs, mais pas dans ma vallée. » Il prit une longue bouffée de son cigare, savourant l'instant.  Mais j'ai confiance en vous. Après tout, je ne paie pas des incapables, n’est-ce pas ?

Les acclamations étouffées des ingénieurs ne firent que flatter l'égo déjà surdimensionné de James, qui tourna les talons, laissant son équipe travailler d’arrache-pied sur ces nouvelles directives. Avant de quitter la salle, il se retourna, plantant son regard dans celui de ses ingénieurs épuisés, mais galvanisés :

— Crystal Valley ne tombera pas. Avec Dominion, elle sera invincible. Quant à vous... J’attends des résultats tangibles. Sinon, vous saurez ce qu’il en coûte de me décevoir.

Le laboratoire se remit en marche, les machines vibrant à nouveau sous l'effervescence de ces nouvelles idées. Mais pour James, tout cela n’était qu’un prélude.

Plus tard, alors qu'il observait les vastes machines du laboratoire depuis une baie vitrée, son esprit s'égara vers des pensées plus sombres. Les visages de Gildarts Clive mort désormais, Nyx, et même de Skyadrum, hantaient ses cauchemars. Des êtres d’une puissance qui transcendaient tout ce qu’il pouvait imaginer. Des anomalies, des menaces que même lui, avec toute sa richesse, ne pourrait probablement pas vaincre sans une nouvelle forme de pouvoir.

Le Projet Dominion n’était pas simplement une armure, ni même un moyen de protéger Crystal Valley. C’était une préparation pour le jour où l’argent ne suffirait plus, où la magie elle-même serait insuffisante face aux titans qui parcouraient ce monde.

— Un jour... murmura-t-il dans le silence des profondeurs de son laboratoire, tirant une dernière bouffée de son cigare. Même ces monstres apprendront ce qu’est le vrai pouvoir.