Ce que je fichais "encore" en garde à vue ? Oh trois fois rien, pour la énième fois et non la dernière, la garde royale a trop peu d'humour à mon goût ! Et moi qui voulais me montrer gentille à la base, mais j'peux pas m'en empêcher. Ça me soule de les voir toujours debout comme des poireaux qui sortent de terre, en attendant d'être cueillis ! Cette fois-ci j'avais voulu aller me balader dans les jardins du palais, hélas, chasse gardée et terrain étant inaccessible, je m'étais dis "tant qu'à faire, autant nous ennuyer ensemble, plutôt que chacun dans son coin"... Je leur avais donc ramené un café histoire de bien les réveiller en tapant quelque peu la conversation... Cafés volés sur les terrasses discrètement, bien sûr ! Bon, évidemment, c'était sans leur dire aussi toutes les merdes que j'avais mis dedans, quelques cendres de cigarettes qui traînaient dans les cendriers de terrasses, un peu de terre provenant des parterres de fleurs de la ville, et mon grand préféré : le sel et le poivre de table.

Qu'est-ce que je peux être inventive quand il s'agit de faire des conneries ! J'avais un peu attendu avec compassion qu'ils finissent de vomir leurs tripes et enfin je pouvais leur faire faire un peu de sport en courant aussi vite que je pouvais dans ces jardins. J'admet que c'était bien marrant, que les fleurs y sont jolies d'ailleurs, et j'avais réussi à prendre des photos avec mon PHS mais je n'ai rien publié. Il faudrait d'abord que je trouve le moyen de rendre cette machine furtive et non identifiable avant de publier quoique ce soit.

Ils avaient bien galéré à me rattraper, hélas s'ils n'avaient pas eu l'idée de me prendre en traitre, ils n'auraient pas pu m'avoir. Stupide Nui ! Combien de fois tu vas apprendre à éviter les culs de sac ? Quoique, c'était mérité de leur part et j'avais la flemme d'utiliser ma magie pour leur échapper. Bref, après la lourde gueulante que j'avais pris dans les dents, je m'étais faite enfermée et voilà j'en avais pour quelques jours uniquement si je me tenais à carreaux, ce qui était prévu. Mais voilà que quelques heures plus tard, alors que je me faisais une beauté des ongles, la porte s'ouvrait. Aux premiers abords, l'espoir que l'on me libère fut trop beau. Je levais le regard. Oh non un coloc' ! Pff... D'ailleurs, lui aussi soupirait comme un bœuf.



Dit-il ! ...Tiens ? On me connaît ? J'avoue que là comme ça, j'ai eu du mal à me le remettre en mémoire. Attends, quoique, à bien y regarder ! Des lunettes, brun, yeux bleus, mignon comme tout ...Oh ! ...LUI ! Tiens où est passée son éternelle sucette ? Je souriais doucement en l'accueillant calmement.



Aussitôt il se retournait vers la porte, comme paniqué.



S'excitait-il sur la porte alors que j'étais assise au sol sans bouger. Il leur lança une pique histoire d'en rajouter une couche, mais quelque part ses dires me rappelaient qu'il était aussi fauché que moi. Je rangeais le pinceau de vernis cyan dans son petit bocal, tout en m'éclaircissant la voix.



En effet, je connais le jeune homme, d'ailleurs il a le même âge que moi. Je l'ai parfois croisé aux détours d'une ruelle lorsqu'on avait eu la même idée de lieu à squatter pour la nuit. Je lui ai parlé vite fait ces quelques fois mais j'ai l'impression qu'il s'est vite fait son opinion à mon sujet, et qu'elle n'est pas si bonne que ça. Halala... je soupirais en m'en apercevant. "Je suis maudite ou quoi ? Bon, je ne vais pas chialer que personne ne m'aime hein, j'ai autre chose à foutre. Mais ne me dis pas qu'il a encore peur de la fois où j'avais tiré du sang à un autre mage, presque sous son nez ?" Je l'avais vu m'espionner, oui ! Cependant, je n'avais pas eu envie de lui en tenir rigueur ou de relever, je sais que la plupart des gens me trouvent sombre et effrayante rapport à ça. Mais s'il en connaissait la raison, il ne flipperait pas autant que ça. De plus j'ai appris à cacher cette maudite poche, son câble et la main reliée à tout ce fourbi. S'il ne fouine pas trop, il pourrait se rassurer un peu, du moins je l'espère. N'en sachant que très peu à propos de monsieur le beau gosse, je n'avais pas osé approfondir, mais peut-être que ce serait le lieu approprié pour le faire sans qu'il puisse fuir ? Je me levais et m'approchais doucement de lui.

Se retournant vers moi d'une vive allure, il m'avait légèrement fait sursauté et il parlait si vite que je le sentais nerveux, trop nerveux. Papillonnant doucement des paupières en le fixant gentiment, j'avais même du mal à le suivre et forcément mes réponses furent un peu plus lentes que les siennes, quoique ça me semblait être d'un rythme normal me concernant. Le beau gosse m'affirmait avoir coopéré, haha, j'en connais une qui a fait la même erreur, juste en face de lui. "J'aurai plutôt dû me tirer oui ! Mais passons, au moins j'aurai revu un mec sympathique avec qui j'ai hâte de faire plus ample connaissance. Mais d'où me fait-il la morale pour le fait de tout faire vivre en société, au juste ?! ... Est-ce que j'ai pensé qu'il était sympathique, il y a quelques secondes avant son insinuation ?! Je retire mes pensées."



Lui répondais-je assez dubitativement, en me sentant évidemment visée et quelque peu agacée. "Moi pas sociable ! Je t'en foutrai ! Mais je ne fais que ça des efforts pour l'être... enfin peut-être pas assez mais jusqu'à présent s'il est encore en vie, cela prouve que je suis un minimum civilisée, sinon il aurait déjà prit mon pied dans la tronche." Quoiqu'il arrive, je ne sais pas s'il l'a remarqué mais il n'y a personne pour surveiller la cage. Et je n'ai franchement pas besoin de magie pour lui mettre la raclée qu'il mériterait, s'il veut jouer au méchant garçon avec moi. Toutefois je ne ferais rien. Le mec se justifiait qu'il était innocent et ça me faisait bien ricaner gentiment. "Ça fait pas deux fois qu'il le dit m'enfin, passons... mais pourquoi il se justifie à moi, en fait ?! J'ai une gueule à être juge et à en avoir quelque chose à foutre de l'autorité de ce monde ? Je serais bien la dernière sur terre à juger quiconque pour ses actes puisque je ne suis pas un ange." Ma foi, avec quelques poignées de secondes, je comprenais où il voulait en venir quand même. Toutefois, je n'arrivais pas à comprendre pourquoi un mec innocent voudrait coopérer, surtout avec une telle magie ?! Il est vif comme l'éclair et ce n'est pas que sa magie, il est d'ailleurs plus vif d'esprit que moi, mais juste pourquoi se laisser cueillir quand on est innocent ? J'pige pas là. Il me faisait également part du nom du type qui ne le supportait pas, je ne comprenais que trop ce qu'il voulait dire par là. Pour ma part, je lui aurais bien répondu le nom de celui qui ne me pifait pas moi, mais je ne le connais pas. Hélas, oui ce grand con de caporal chef ne m'a pas laissé ni son numéro ni son nom, alors ça va être quelque peu délicat de lui faire une petite réputation de merde. Après, j'ai une tête qui ne revient pas à beaucoup de monde donc bon. J'avais la sensation réelle qu'avoir avancé face à Evan, le mettait plus mal à l'aise que nécessaire puisqu'il allait jusqu'à se heurter à la porte. "Oups..." Gênée d'avoir autant ébranlé mon coloc', je reculais alors d'un pas... ce n'était pas suffisant ? Allez, encore un et puis deux. J'ignorais toutefois si c'était juste la surprise, ou si je le faisais vraiment flipper et ça commençait à me déranger. Ou bien, est-ce qu'il ne serait pas juste... malade à cause de ces menottes ?!





"Je trouverai bien autre chose... ça ne manque pas les petits objets cylindriques, fins et assez solides. À la rigueur je pourrais bien démonter ses lunettes pour avoir les petites barres métalliques qui puissent aisément défoncer le verrou de ces menottes, mais s'il a peur de moi, il ne voudra sans doute pas que j'y touche... ou que je l'approche tout bêtement." Par ailleurs, il rouspétait qu'on m'ait laissé le petit pot de vernis. J'étais amusée et souriante de sa réaction, mais également de la réponse que j'allais silencieusement lui fournir : Sans trop aventurer mes ongles sur ma tunique et sans vouloir le draguer, je soulevais prudemment le tissu d'un côté, pour lui montrer le bandage de ma cuisse. Histoire qu'il voie que j'avais planqué ici le vernis, et non dans l'une de mes poches complètement défoncées et trouées, depuis le temps. Si seulement ils m'avaient fouillé en intégralité, mais tant pis pour eux. Peu après je lâchais le tissu qui se replaçait sur ma jambe.



Ricanant de ses propos, je retournais à ma place toutefois moins proche du milieu de la pièce. À vrai dire je m'asseyais plus proche du mur afin de laisser de la place à mon colocataire fraîchement arrivé.



Je soufflais sur mes ongles en fixant doucement du regard mon compagnon de cellule.

D'après ses dires, il allait bien mais cela ne l'empêchait pas de s'installer directement le dos contre la porte, comme s'il s'impatientait de sortir... ou qu'il hésitait encore à m'approcher, va savoir ?! Pour ma part, je n'osais le regarder qu'au début, puis aux abords de ses remarques plutôt pertinentes, je ne pouvais pas m'empêcher de ricaner discrètement. "Non, c'est plutôt cool qu'ils n'aient pas de nana pour fouiller les détenues, ça m'arrange et ça me laisse libre choix de garder certains items utiles." Il marquait un point intéressant à soulever à me dire que j'étais teubée, même si son insulte me passait au dessus, je m'en foutais royalement.


"Eh bien, au moins je sais où le trouver si un jour j'ai besoin de lui parler. Néanmoins, il n'a pas entièrement tord, je ne m'occupe pas assez de mon entourage, bien qu'il n'y ait pas écrit "libre service à plein temps sur mon front", je m'occupe parfois de rendre de réels services aux gens. Même si c'est devenu rare, j'avoue. M'enfin, je m'en fiche après tout..." Pensais-je sans vouloir lui couper la parole.



Lâchais-je dans son haussement d'épaule. Il avait l'air aussi enthousiasmé que moi.


Il ne s'en rendrait peut-être pas compte, mais il venait de taper là où ça faisait le plus mal. Je gonflais légèrement les joues, voulant m'armer de patience en cherchant quoi lui répondre de pas trop méchant. Mais un brusque "Hmpf !" sortait de ma bouche boudeuse, tandis que je me tournais dos à lui, tout en restant assise. Si je tentais de camoufler mes quelques larmes et mes rougeurs de honte dans cette partie sombre de la cellule, j'espérais aussi qu'il ne vienne pas s'en mêler. Mais je ne pouvais pas le laisser sans réponse. Je posais ma tête contre le mur, me recroquevillant un peu pendant que mes bras entouraient mes genoux.


J'essuyais mes larmes, "faut que j'arrête de me tourmenter sur ça... même si c'est dur, ça n'en vaut plus la peine", pensais-je. "N'empêche que si j'tenais ces enfoirés qui ont rasé mon village, et tué tous mes proches... je leur lâcherais le fauve qui est en moi sur la gueule !" En attendant, je ravalais doucement ma haine. Evan ne m'avait rien fait, il ne méritait pas que je passe mes nerfs sur lui. Je redirigeais lentement mon regard vers lui et l'observant, je ne pouvais qu'y lire une solitude presque identique à la mienne. J'ignorais ce que lui avait perdu, mais ça se lisait dans son regard.


J'espérais ne pas marcher sur des œufs comme il l'avait fait me concernant, mais si c'était le cas, je ne pourrais que m'excuser d'une manière ou d'une autre.

Toujours affalée le flan et l'épaule contre ce mur, j'avais fini par regarder de nouveau ce brun, et puisque ça allait mieux, je me tournais à demi pour affaler mon dos. Le glacial béton était aussi rude et inconfortable que les nuits fraîches passées dans la rue. Mais ça avait plus l'air confortable que ces barreaux rouillés là-bas. Je gardais ma position, entendant qu'il ne m'aurait de toute façon pas donné de sucette... "Hmhm... Crétin. Dommage, moi qui aurais pu nous délivrer plus vite."


Est-ce que j'omettais volontairement dans ma réponse le fait qu'il n'y ait pas de pitié à déclarer ? Parfaitement, oui, car j'étais contente qu'il n'en ai pas à mon égard. Il en aurait eu... je lui aurais retourné violemment mon pied dans la tronche. Cela ravivait mon petit sourire sur mon visage tout comme l'éclaircie suit la pluie. La conversation s'enchaînait et il me racontait qu'il avait beau avoir reçu un enseignement, ça ne faisait pas de lui un garçon obéissant. Qu'il avait pas le contrôle sur certaines choses et qu'il était si rapide qu'il pouvait faire plus de choses rien que durant un clignement d'yeux...


M'exclamais-je étonnée. Non pas que je ne le croyais pas, c'était tout l'inverse. Peut-être restais-je naïve mais au fond, je souriais en coin. "Tant mieux qu'il n'ait rien pour retirer ses menottes alors, ahaha... Pour une fois qu'on a l'occas' de se croiser et de taper la discute."


Passant du coq à l'âne, le jeune homme m'analysait du regard, et glissait un conseil concernant les guildes. Pendant qu'il parlait, je me relevais doucement. Et tandis que je m'avançais délicatement pas à pas, je m'arrêtais face à lui qui en concluait qu'il n'avait pas envie de me voir juste pour ça... parce que j'étais chelou à ses yeux. Je m'agenouillais face au beau brun qui se mordillait l'ongle. Pensive, j'essayais de tourner mes phrases dans le bon sens et tant pis si ça le faisait flipper, je préférais crever l'abcès, même si j'en oubliais de sourire, ce qui aurait pu le mettre à l'aise.


Pendant que je parlais, je tirais doucement sur la molette qui régulait le sang dans le tuyau relié à ma main. La diffusion arrêtée, je débranchais le cathéter de ma main et lui montrais... je le rapprochais doucement de son visage puis de son cou. Stop, j'arrêtais là. Je voulais juste voir son visage, sa réaction.


J'avais bien entendu qu'il me demandait comment je me nommais pendant que sa main retombait. Je commençais à voir flou et me sentir étrange comme si le sang s'arrêtait de circuler, j'étais toute engourdie. Aussitôt je replantais dans ma main tremblante cette aiguille. Évitant de me plaindre ouvertement, je serrais les dents quelques secondes. "Ouf, c'était si douloureux, je joue vraiment avec ma vie pour rien." Le temps de m'en remettre, tête baissée, je finissais ma petite histoire.


Je m'asseyais plus sur le côté, me reculant doucement de lui.

De ce qu'il me disait, j'arrivais à comprendre qu'il soit rapide à interagir autant extérieurement qu'intérieurement, qu'il raisonnait vite mais que ça ne signifiait pas pour autant qu'il était intelligent. J'hochais doucement la tête une fois ou deux, dubitative. Sacrée magie quand même ! Néanmoins, il n'avait pas nié le coup de la solitude. Mais cela voulait dire quand même que privé de sa magie, il était de retour à toute vitesse normale et que ça devrait sans doute l'incommoder, tout comme moi avec le fait que je ne puisse pas m'éclipser... c'est tellement frustrant et déconcertant. Moi qui suis aussi très dépendante de mes Shuriken, pas seulement pour attaquer, mais pour absolument tout faire, je suis tellement stressée à l'idée de ne pas pouvoir les utiliser là, maintenant. Néanmoins le début de mon histoire l'avait fait réagir au fait qu'il ne soit pas vacciné, j'en riais doucement. "Ufufufu..." - "Qu'est-ce que j'en ai à cirer ?!" Pensais-je sur le moment. Mais soyons francs, je n'avais clairement pas l'intention d'infecter mon petit matériel sur lui quoiqu'il arrive, j'avais juste besoin de lui faire comprendre les choses par des gestuelles, ce qui m'avait fait tourner la tête et plus fait de mal à moi qu'à lui. Il ne flippait pas de manière extériorisée, c'était surprenant, mais le fait qu'il ne bouge pas me donnait certaines réserves au fait qu'il pouvait me trouver dangereuse, quoique ça je m'en fous. Lorsque j'arrivais à la fin de ma petite présentation, il me répondait avec quelques retenues et doutes.


Je réactivais discrètement la diffusion de la poche vers ma main par un coup de doigt sur la molette. Il ne faudrait pas que je fasse un malaise ici. Je restais assise non loin de lui, sans trop bouger.



Je soupirais. "C'est quoi ce doute ? Faut le dire si je dérange ?!" Un peu vexée, je ne pouvais m'empêcher de lui répondre franchement ma façon de penser.




"Hm ?! Attends, il se fout de ma gueule en vrai ? Cette poupée... grr... Retiens toi, c'est pas le bon endroit pour le buter. Zen... Nui... ZEN !!!" L'idée de me lever et lui retourner un coup de pied dans la trogne m'était brièvement passée par la tête, ça, nul doute que je n'avais pas besoin de magie pour le faire, mais je me retenais et je restais assise. Je mis quelques secondes afin de répondre le plus gentiment et sarcastiquement possible, plutôt que de céder immédiatement à la violence. Un petit sourire enjoué se dessinait doucement sur mon visage pendant que je parlais.


Là, au moins, il aurait des raisons de s'éloigner de moi ! S'il me trouvait cinglée, il pourrait tout autant se regarder dans une glace, juste par le fait de me provoquer. Chacun des gardes royaux que j'avais embêté jusque-là, savait à quel point me provoquer serait dangereux pour leur santé. Encore heureux qu'ils soient bien dressés comme les toutous du gouvernement qu'ils sont. En revanche Evan, ou Teru s'il préférait, avait des soucis à se faire s'il voulait continuer sur cette pente glissante.